Débat à l’espace Rachi – Compte-rendu (première partie)
19 mar 2007 par Samuel Sebban |
Le 15 mars à 20h30 s’est déroulé dans les locaux de l’espace Rachi un débat entre trois représentants politiques des trois partis favoris à l’élection présidentielle, un philosophe et un géopolitologue sur le thème de la politique internationale et de ses enjeux. LA soirée était organisée par la radio RCJ, et comportait majoritairement un publie de personnes de confession juive. Etaient ainsi présents :
- Alain Finkelkraut, intellectuel français et écrivain
- Benjamin Stora, professeur des universités, spécialiste des questions du Maghreb
- Jean-Louis Bourlanges, député européen et vice-président de l’UDF
- David Assouline, sénateur et membre de l’équipe de campagne de Ségolène Royal, qu’il a notamment accompagnée lors de sa visite au Proche-Orient, pour le PS. Il remplace au pied levé Julien Dray, invité avec la candidate sur France 2 dans l’émission A vous de juger.
- Pierre Lellouche, député UMP, secrétaire national à la défense et membre de la commission des Affaires étrangères et de la Délégation pour l’Union Européenne de l’Assemblée Nationale.
L’ordre du jour de la soirée était essentiellement de parler de politique étrangère, du Proche-Orient, en particulier d’Israël, de l’Iran, de la place de la France dans le monde, et de thèmes de campagne tels que la laïcité, la sécurité, l’Ecole, mais aussi le racisme et plus particulièrement, l’antisémitisme.
Pour inaugurer la soirée, l’animateur a tenu à laisser la parole aux candidats sur le Proche-Orient.
Les politiques et la question du Proche-Orient
J.-L. Bourlanges
Concernant la question épineuse de la situation au Moyen-Orient, le représentant de l’UDF a rappelé de façon humoristique qu’il n’allait certainement pas résoudre à lui tout seul une question qui se pose depuis plusieurs décennies.
Néanmoins, il s’est projeté dans une vision à long terme, énonçant la nécessité selon lui de bâtir quelque chose dans cette région, de construire un système organisé avec lequel on puisse travailler de façon constructive. Selon lui, tel est l’objectif.
Quant à la situation actuelle, la situation est complexe puisqu’il faut traiter les questions du Liban, des tensions entre le Fatah et le Hamas, de la question iranienne.
D. Assouline
, qui dit dans une interview
Avant de parler de la situation internationale, le représentant du PS a insisté sur le fait qu’il n’y avait et ne devait pas y avoir de vote communautaire. Il y a des Juifs de gauche, de droite et du centre, et cela doit rester ainsi.
Concernant le Proche-Orient, il a justifié le voyage controversé par l’UMP de Ségolène Royal par le fait qu’elle n’a jamais été directement responsable des questions internationales au cours de sa carrière politique. Ses voyages, dont également celui en Chine, ont pour objectif pour elle de prendre connaissance des problèmes cruciaux du monde.
Il a fustigé le comportement de l’UMP lors de son voyage au Proche-Orient, rappelant qu’en Israël elle avait reçu un accueil très chaleureux de la part de M. Olmert et de Mme Livni qu’elle a écoutés avec attention.
Un des enjeux pour la France, selon M. Assouline, et de remettre en question le positionnement historique et culturel de la France, qui, depuis le général de Gaulle, est généralement proarabe.
P. Lellouche
Le représentant de l’UMP s’accorde avec son homologue du PS sur la nécessité d’éviter un vote juif, taclant au passage Pascal Boniface et sa fameuse note aux responsables du PS (« La communauté d’origine arabe et/ou musulmane s’organise également, voudra faire contrepoids et, du moins en France, pèsera plus vite lourd [que la communauté juive], si ce n’est déjà le cas. », texte intégral ici).
A la question d’éventuels changements dans la politique étrangère de la France, sa réponse est oui et non.
Il tient à rappeler que les positions de la France sont conditionnées par un grand nombre d’éléments, parmi lesquels son histoire, sa géographie, ses intérêts stratégiques. Ainsi, s’expliquent les liens d’amitié avec le Maghreb, notamment. Pour lui, il n’y aura pas de rupture sur cette politique, mais des inflexions, peut-être. En tout cas lui les souhaite au nom de l’intérêt national. Il souhaite notamment pour le monde arable liberté et démocratie. La politique ne fait pas cause des soi-disants groupes de pression. Ce n’est pas parce que certains pays arabes sont amis de la France que le France est acquise à leur cause quoi qu’il se passe.
Aujourd’hui, le Proche-Orient est une « bouilloire », en particulier avec l’émergence de l’Iran, qui s’est placé en ennemi juré d’Israël, à dominante chiite anti-sunnite. Ceci, dans un contexte de guerre civile entre Israéliens et Palestiniens, ces derniers ne disposant pas d’un territoire, et enfin dans un contexte de crise d’identité culturelle et politique en Israël, qui manque de leader.
Pour M. Lellouche, M. Sarkozy est conscient que le dossier le plus brûlant qu’aura à gérer le futur président de la République est le cas de l’Iran. Mais se poseront d’autres questions :
- la question du Liban
- la question d’un dialogue ou non avec la Syrie
Sur l’Iran, M. Lellouche n’exclut pas une solution négociée, mais pour lui, il faut maintenir l’unité du conseil de sécurité de l’ONU, et exclure toute démarche personnelle. Il a d’ailleurs condamné la visite de M. Lang en Iran.
Ensuite, il a tenu à revenir sur la qualification de « caniche des Etats-Unis » de M. Fabius à l’égard de M. Sarkozy, rappelant que les Etats-Unis, tout comme Israël, bien entendu, sont les alliés de la France, ce qui ne signifie pas pour autant que la France agirait à la solde des Etats-Unis. Ayant assisté à l’entretien avec M. Bush, il a affirmé que M. Sarkozy avait parlé d’amitié, mais également d’indépendance de la France, notamment quant aux choix stratégiques et militaires de l’administration Bush. M. Lellouche s’est enfin félicité de la politique de défense de la France, 100 % indépendante.
J.-L. Bourlanges
Le représentant de l’UDF ayant disposé d’un temps de parole moindre par rapport à ses homologues, celui-ci a repris la parole pour s’exprimer à propos de l’Iran. Il s’est dit conscient des objectifs, et a affirmé que les trois partis était d’accords sur le fond, et sur ce que chacun doit s’efforcer de défendre. Le désaccord intervient sur les moyens à mettre en oeuvre.
M. Bourlanges affirme qu’avec l’intervention américaine en Irak, l’Iran a perdu deux de ses principaux rivaux : l’Irak et… Les Etats-Unis, trop embourbés pour s’orienter différemment. Selon lui, la situation chaotique en Irak et ailleurs s’explique par des réactions réciproques suite aux raidissements sunnites et chiites. Les chiites sont partout : Irak, Syrie, Liban, Yémen… La France s’est positionnée contre la guerre en Irak, mais il déplore l’absence de position européenne forte à ce moment là, qui aurait peut-être fait infléchir les Etats-Unis.
Il faut, selon lui, être très ferme avec l’Iran, mais il ne faut pas oublier qu’il existe de nombreux moyens de pressions, n’en déplaise au président Ahmadinejad qui n’est qu’un provocateur qui, un petit peu comme Castro à Cuba, s’appuie sur l’archaïsme et l’isolationnisme pour conserver son pouvoir.