Grand corps malade, poète de notre temps
24 juil 2007 par Samuel Sebban |
Après plusieurs années d’insoutenable attente, j’ai enfin eu l’occasion d’assister au festival Solidays, à l’hippodrome de Longchamp. Si les têtes d’affiche ne semblaient a priori pas forcément à la hauteur de ce qui se faisait les années précédentes, c’était pour moi l’occasion de découvrir de nouvelles choses. Sous une pluie battante, nous nous sommes réfugiés dans le chapiteau le plus proche, dans lequel rien ne se passait dès lors qu’on était entre deux concerts. Etait annoncé à venir : Grand Corps Malade.
A l’heure dite, un jeune homme arrive sur scène, seul, et il se sert d’une béquille pour marcher. Cet homme prononce un texte sans musique, intitulé Le jour se lève. Aux premiers mots, je dis à ma fiancée « et m…, c’est encore du rap ». Je n’ai rien de particulier contre le rap, mais la dernière fois que j’en ai écouté, c’était furieusement répétitif et un peu trop violent. Surtout que moi, ce qui m’intéresse c’est surtout la musique et la voix… Bref, de là à dire que je n’ai pas une excellente image du rap, il n’y a qu’un pas. Mais en fait, ce n’était pas du rap, mais du slam. Première fois de ma vie que j’entendais parler du slam, je suis vraiment hors du coup, ça doit vouloir dire que quelque part, je suis plus un jeune (prononcer djeuns)…
Le slam c’est quoi ? Ce sont en fait des gens qui disent des textes, avec ou sans accompagnement musical. En gros c’est de la poésie, mais moderne, avec les mots de maintenant et les concepts de maintenant. Et Grand Corps Malade est phénoménal. Très rapidement, ses textes nous happent, nous transportent, nous enthousiasment. Nous émeuvent aussi, intensément. Ce jeune homme handicapé qui arrive a donner une leçon de vie à des gens qui passent leur temps à se plaindre. Quelle force ! Grand Corps Malade pour moi, ça ne se lit pas, ça s’écoute. Outre ses textes percutants, sa force, c’est son interprétation. Loin des clichés du rap violent, il peint la banlieue comme le lieu de vie de gens de toutes origines qui se battent pour s’en sortir, dans la joie et la bonne humeur. A l’heure où la critique des banlieues bat son plein, il est bon que des artistes tels que lui montrent autre chose que la haine et la violence.
En bref, Grand Corps Malade parle de la vie. De son envie de vivre. Une des plus touchantes est probablement Sixième Sens, où il évoque son handicap. Mais encore une fois, ça s’écoute. Personnellement, je recommande.
Autre découverte de Solidays, Abd Al Malik . Un peu plus difficile à écouter pour moi, parce que c’est du rap un peu plus traditionnel, ses textes sont également solides et amènent à réfléchir. En particulier, la chanson Les Autres m’a beaucoup plu, où le leitmotiv est de dénoncer cette tentation facile de dire constamment « C’est pas moi, c’est les autres ». Bref, la jeune génération d’artistes dits « de banlieue » nous montre un autre visage de ces quartiers, un visage de gens qui réfléchissent, qui s’engagent, et qui font rêver. Des artistes, quoi