Le Management, une affaire de personnes, pas de process
15 fév 2007 par Samuel Sebban |
J’ai certainement tort de le penser, mais quand j’entends des gens, consultants ou autres, parler de « processus de management » quand il s’agit de ce qu’on appelle aujourd’hui crânement la gestion des ressources humaines, ça me fait doucement rigoler.
Pour le dire clairement et synthétiquement, une bonne gestion des hommes, c’est avant tout une question de manager… Les meilleurs processus du monde ne permettront pas à un mauvais manager de gérer des hommes, c’est-à-dire, d’en tirer le meilleur tout en leur donnant les moyens de s’épanouir dans leur tâche ou travail. Je ne dis pas que les processus ne servent à rien, en particulier dans les très grosses structures, encore que…
Qui je suis, moi pour donner des leçons ? C’est sûr que pour l’instant, je n’ai eu que peu d’occasions d’expérimenter la gestion des hommes, mais j’ai déjà 2 expériences fortes desquelles j’ai énormément appris :
- J’ai dirigé un centre de vacances, avec donc une équipe de 5 animateurs + 5 personnes de personnel technique
- J’ai dirigé l’association qui organise le Week-End d’Intégration (WEI) de l’Ecole Centrale Paris, c’est-à-dire un voyage de 600 personnes, dont une centaine d’enseignants ou personnels dirigeants de l’Ecole, avec un budget de 100000 € et tout ce qui s’ensuit de responsabilités et de tuiles. Mais le plus intéressant ici, c’est que j’ai managé une équipe de 35 personnes pour la préparation, et 80 pendant l’évènement. J’étais assisté d’une trésorière et d’un secrétaire général.
Ce que j’ai compris pendant ces 2 expériences, c’est que la première chose à faire, c’est de faire comprendre à ses collaborateurs que ce qu’ils font est important et utile, autrement dit, focaliser l’attention de tout le monde vers l’objectif ultime. Il faut apprendre à connaître intimement chacun de ses collaborateurs les plus proches pour les comprendre, et pour cela dialoguer, écouter. Il faut être cohérent et juste dans les félicitations, comme dans les sanctions s’il y a lieu. Il faut être exemplaire, exigeant avec les autres, mais encore plus avec soi. Et quand je dis exemplaire, ça signifie que tout le monde est logé à la même enseigne, en particulier en ce qui concerne la répartition des tâches ingrates non attribuées à quelqu’un en particulier.
Après, c’est sûr que c’est plus difficile quand il s’agit d’un contexte professionnel dans lequel les gens travaillent pour gagner leur vie. Mais ça n’empêche pas de faire certains efforts pour leur montrer que l’entreprise a besoin d’eux, qu’on les comprend et qu’on les aime. Quand je vois comment certaines entreprises considèrent leurs employés, il ne faut pas s’étonner à mon sens que celles-ci soient en crise (PSA, si tu me regardes). La gestion des hommes chez PSA est ridicule et innefficace au possible. De la vraie bureaucratie débile, en tout cas pour la partie bureaux. On contrôle tout, les ordinateurs, les horaires, tout. En gros, là où on pense qu’en coupant l’accès au net, qu’en surveillant leurs horaires, on aura des gentils robots obéissants et efficaces, on obtient des loques qui font leurs heures, qui envoient 3 mails, qui font 4 pauses cafés, et qui rentrent chez eux. Et surtout, qui s’emmerdent comme c’est pas permis à leur boulot et se fichent royalement des enjeux, dont de doute façon ils ne sont pas informés.
Au-delà des contraintes qui, je le pense, ne servent à rien (je suis moi-même dans une entreprise, Planisware, où ces contraintes sont inexistantes et où les gens sont traités de façon merveilleuse, tant dans les conditions de travail que les conditions salariales, et qui malgré tout fait 30 % de croissance annuelle depuis 10 ans), c’est beaucoup une question d’hommes. Ce que je vais dire est assez terrible, mais tout le monde n’est pas fait pour être manager.
Je vais prendre un exemple qui n’a rien avoir, n’en déplaise aux non-amateurs de football (même si le sujet n’est pas le foot !) : celui du Paris Saint Germain. Jusqu’en janvier 2007, Guy Lacombe a été l’entraineur du PSG. Ce fut la période la pire dans l’histoire du club, du point de vue des résultats. Les compétences tactiques de Lacombe, qui peut se targuer d’un très bon bilan à la tête du FC Sochaux, ne sont apparemment pas en cause. Alors on a mis en cause les joueurs, joueurs qui pourtant ont pour beaucoup réussi, voir même très bien réussi, dans d’autres clubs de Ligue 1 : Landreau, Yepes, Armand, Rothen, Cissé, Kalou, Dhorassoo, Pauleta. Rien qu’avec ceux-là, normalement il n’aurait pas du y avoir de problème d’un point de vue jeu. Donc, si le problème ne vient pas de la tactique, s’il ne vient pas des qualités intrinsèques des joueurs, il est nécessairement d’ordre relationnel. D’ailleurs, l’arrivée de Paul le Guen suite au licenciement de Lacombe en janvier, qui a du faire avec le même groupe de joueurs, a manifestement changé la donne. Ces joueurs qui subissaient, qui souffraient, sont soudainement devenus conquérants et accrocheurs. On dit même qu’aujourd’hui, la réussite est de nouveau du côté du PSG. Certes, l’ère Lacombe a été poissarde à souhait, mais la réussite, ça se provoque aussi. Et ça vient avec ce qu’on appelle, la confiance. Au lieu de contraindre, il faudrait faire confiance.
Si on accorde sa confiance et que ça ne fonctionne pas, on pourra toujours contraindre. Cependant, commencer par la contrainte ne me parait pas être la bonne solution. Je n’étais pas franchement favorable au licenciement de Lacombe, je commençais moi-aussi à dire que quel que soit l’entraineur avec un groupe pareil de toute façon… Pourtant, même si on ne peut pas encore crier victoire, les joueurs commencent à s’éclater, à revenir en forme, et ça se voit. Le Guen n’est ni plus ni moins compétent que Lacombe, mais c’est un… manager