1969-2009 : Une bouffée d’Hair ?
21 mar 2009 par Samuel Sebban |
Ma semaine a été très chargée d’un point de vue culturel : Outre le showcase de Zorro et le concert de Bénabar, j’ai eu l’occasion d’assister ce mercredi à une des dernières représentations du revival du musical Hair, rendu célèbre par la participation de Julien Clerc (et de son anatomie) lors de son adaptation en France en 1969. 40 ans après, Ned Grujic ressuscite le mythe en proposant une nouvelle adaptation du spectacles sur les planches du théâtre Trianon à Paris.
La distribution
Je ne pouvais manquer ce spectacle sous aucun prétexte : Fabian Richard (Cabaret, Chance!, …), Laurent Ban (Chance!, Babel Opera World, voix française du film The Phantom of the Opera, …) et Yoni Amar (L’Homme qui Rit, Chance!, …), rein que ça, se sont donnés rendez-vous pour refaire le monde. Il sont d’ailleurs bien accompagnés, par des artistes aux univers bien différents, de l’opéra au R&B, à savoir Liza Pastor, Caroline Bal, Julie Giamette, Yvana Verbecq, Melusine, Tiphanie Doucet, Magali Bonfils, Antoine Lelandais, Marc Beaujour, Billy Trane et Daniel Delyon, soit 14 artistes réunis sur le spectacle.
Autant le dire tout de suite : le niveau de ces artistes, assez nouveaux dans le monde du musical pour la plupart, est tout simplement exceptionnel. Je ne pensais même pas qu’il puisse exister autant d’artistes si complets en France : tous sont d’excellents chanteurs, de magnifiques danseurs et de formidables comédiens.
Cependant, mon coup de cœur, qui ne peut pas être Fabian Richard, ni Laurent Ban ni Yoni Amar que je connaissais déjà, est sans conteste Antoine Lelandais. Incroyable charisme, une voix en or, un déhanché de folie, bref un artiste magique. J’espère sincèrement qu’il fera une longue et belle carrière dans le théâtre musical. Sinon, Fabian Richard et Laurent Ban sont fidèles à eux mêmes, c’est-à-dire exceptionnels, et Yoni Amar tout à fait dans le ton, comme à son habitude (notamment un numéro où il chante tout en faisant des gestes d’automate, séquence ahurissante!).
Le spectacle
Premier élément : je n’ai vu aucun show ni aucun film sur Hair avant celui-ci. Ce billet ne fera donc pas de comparaison. Ned Grujic a fait le choix d’assumer le fait qu’on est en 2009. Les comédiens font régulièrement référence au fait que 40 ans les séparent de 1969, pour dire que finalement rien n’a changé.
Au final, l’ensemble est très vivant, très coloré et servi, j’insiste, par des artistes hors norme. Je dois néanmoins reconnaitre que je n’ai pas accroché plus que ça avec la musique, ni avec le livret. Je ne pense pas que ce soit lié à la mise en scène, plus au côté davantage « opéra-rock » que musical. Les tableaux s’enchainent sans logique véritable, et le spectacle ne comporte aucun fil rouge. Ainsi, on se demande où les comédiens essaient de nous emmener. J’ai donc été partagé sur le premier acte entre un enthousiasme débordant sur certains tableaux et un ennui mortel sur d’autres.
Cependant, la crédibilité du seul élément tangible de scénario, à savoir si le personnage de Claude (Fabian Richard) ira ou pas à la guerre, semble légèrement hors de propos, puisqu’il n’existe plus de service militaire en France. On comprend bien le message pacifiste (le fameux « Faîtes l’amour, pas la guerre »), mais il est difficile pour les personnes de ma génération de comprendre le dilemme du personnage qui doit choisir entre ses idéaux et son devoir, puisque les personnes de ma génération n’avons pas eu besoin de faire ce choix. Cet élément nuit selon moi grandement à la crédibilité du discours qui consiste à dire que rien n’a changé.
De ce fait, j’aurais trouvé plus judicieux d’assumer l’année de création du spectacle et de bien replacer les personnages et leurs turpitudes dans son contexte : celui de la fin des années 1960, les années hippies. Une dame qui a vu la première version nous expliquait à l’entracte que le spectacle avait beaucoup perdu de son aspect choquant, car en 1969, son propos réellement provocant avait constitué un choc. Il est dommage que par une approche différente, Ned Grujic n’ait pas essayé de retranscrire cet impact plutôt que d’adapter le spectacle à 2009, où la plupart des éléments choquants en 1969 sont quasiment devenus monnaie courante.
Par ailleurs, la sonorisation du spectacle était par moment très désagréable, la musique étant souvent trop forte pour les voix. Si l’on ajoute à cet élément le fait que certains des artiste, notamment les novices du musical, n’articulaient pas suffisamment, cela nuisait grandement à la bonne compréhension des textes, que ce soit en Anglais ou en Français.
Conclusion
Malgré les petits reproches que je fais au spectacle, j’ai passé un bon moment dans l’ensemble. Il est toujours aussi agréable de savourer les tubes interplanétaires que sont Let the Sun Shine, Manchester England, Aquarius et toutes leurs copines, et dans l’ensemble ils l’ont très bien fait. Malgré tout, ce spectacle ne laissera pas une trace indélibile dans ma mémoire pour toutes les raisons sus-citées. J’ai passe une très bonne soirée, notamment de par la qualité et le rythme du second acte, mais je n’ai pas accroché plus que cela avec la thématique un peu dépassée et avec les chansons d’une façon générale. Le spectacle s’arrête fin mars, donc dépêchez-vous si vous voulez en profiter !