La dérive de l’information
27 oct 2009 par Samuel Sebban |
Histoire de faire mieux en octobre qu’en août et en septembre réunis, voici un petit article de politique, pour changer un peu de Zorro et des comédies musicales en général. Vous noterez que je n’ai pas parlé du conflit au Proche-Orient depuis un moment, non pas que ça ne m’intéresse plus, mais il ne s’y passe rien de macroscopiquement intéressant. Des tractations, des rumeurs, des attaques verbales, mais aucun changement significatif. Ce n’est pas grave, en France, il y a toujours du grain à moudre. Aujourd’hui un petit article sur les dérives du journalisme.
Jean-François Kahn : du journalisme à l’opposition
Je regardais récemment un débat télévisé sur France 3, qui concernait le bilan à mi-mandat du président Sarkozy. Etaient invités un certain nombre d’intellectuels, un magistrat et… Jean-François Kahn. Ex-journaliste et patron du torchon de l’hebdomadaire Marianne, il s’est récemment reconverti dans la politique en s’engageant pour les élections européennes dans un parti minoritaire déjà dépassé : Le Modem, avec le succès que l’on connait. Jeune, il était adhérent au parti communiste et c’est assez naturellement qu’il s’est farouchement opposé au candidat de l’UMP aux dernières élections présidentielles, alors qu’il était directeur de Marianne.
Sans grande surprise lors de ce débat, il s’est donc soigneusement appliqué à dézinguer le bilan du gouvernement. J’ai donc découvert avec un relatif étonnement que l’ex-journaliste a joyeusement franchi le pas de la politique politicienne, avec une façon de discourir tout à fait significative. Prenez un zeste de clichés, une pincée de raccourcis démagogiques, une cuillère à café de mensonges par omission, quelques kilos d’affirmations non-argumentées, une louche de critiques non constructives et surtout, un puits de désinformation, et vous obtenez le Kahn nouveau. Yes, he Khan !!!
Selon lui, bien entendu, le président Sarkozy n’a, à l’instar de Raymond Domenech selon Christophe Dugarry, rien fait de bien. Déjà, cette position tranchée est pour le moins douteuse. Il n’a pas engagé les « bonnes » réformes, et pire, il a commis de graves erreurs. Reconnaissant tout de même que la crise n’est pas uniquement liée à l’action gouvernementale, il affirme que les inégalités ne font que grandir en invoquant le bouclier fiscal, qui est une erreur, selon lui. Je ne vais pas m’appesantir sur les sujets débattus, parce que l’on peut être d’accord ou pas en argumentant, mais on sent dans ses postures une haine assez viscérale du personnage, mais surtout un manque d’humilité étonnant.
Ce monsieur, licencié d’histoire, n’a aucun scrupule à donner des leçons d’économie et de fiscalité, comme si c’était son domaine de compétences, reprenant les raccourcis classiques et très démagogiques du « toujours plus pour les riches, rien pour les pauvres ». Parlons du bouclier fiscal, mais pas du RSA. Et bien sûr, la défiscalisation des heures supplémentaires est une erreur, puisque que « tout le monde le dit ». Pour quelqu’un qui a étudié l’histoire, invoquer la raison du plus grand nombre qui a causé tant d’erreurs par le passé est plutôt cocasse.
J’ai d’abord pensé qu’il s’agissait d’une posture politique. En regardant l’émission, j’ai compris qu’il s’agissait en fait aussi d’un mélange de malveillance, d’ignorance et de simplicité d’esprit. Si l’ensemble des journalistes fonctionne comme Jean-François Kahn, je comprends mieux la crise journalistique actuelle, caractérisée par la défiance grandissante des Français vis à vis des journalistes (42 % considèrent qu’on ne leur dit pas la vérité selon un sondage TNS Sofres du début de ce mois d’octobre).
De l’information à la sensation
Soi-disant à cause d’internet, les médias sont légitimes à ne plus faire de vraies enquêtes de terrain, à ne plus vérifier leurs informations et surtout à confirmer une transformation lente mais malheureusement inéluctable de la presse d’information en presse à scandale. Lancer ou alimenter des « polémiques » (le nouveau mot préféré des journalistes) est devenu l’objectif central des journalistes d’information. Il ne s’agit plus d’informer, mais de choquer, de créer la sensation (Pascal Sevran en a récemment fait les frais). Un petit exemple ?
La case du midi sur la chaîne Canal + a évolué ces trois dernières années. Après l’arrêt malheureux de l’émission En aparté de Pascale Clark, Samuel Etienne a créé l’Edition spéciale, qui a suscité chez moi un sentiment contrasté. Néanmoins, à la fin de la première et unique saison de l’animateur passé désormais sur France 3, je dois reconnaitre que celle-ci fonctionnait plutôt bien, avec Ariel Wizman, croustillant, Nicolas Domenach, intéressant, et Anne-Elisabeth Lemoine, inutile. Elle illustre parfaitement cette dérive vers la recherche du buzz à tout prix. Pourtant diplômée du Celsa (École des hautes études en sciences de l’information et de la communication), ça ne l’empêche pas de donner dans le Paris-Match et compagnie. Avec Samuel Etienne, cet aspect de « l’information » restait toutefois marginal, au profit d’une émission enrichissante.
Bruce Toussaint a repris le flambeau, et là, c’est le drame. Introduisant le concept qui en dit long de « polémique du jour » (comme s’il fallait absolument une nouvelle polémique tous les jours !), ainsi que le fameux « cook & mix » (ou comment changer un temps de recette de cuisine en lamentable bataille de bouffe sur de la house), le contenu de l’émission surfe sur les buzz du moment, se plaçant dans la condamnation simpliste, sans enquête, en s’appuyant sur les sms des mécontents. Le sommet de l’inepte revient sans contestation à Daphné Bürki, la fameuse spécialiste des tendances. Son rôle est simple : soit elle présente le top 10 des vidéos youtube les plus vues, soit elle présente sur son fameux « fond vert » des défilés de vêtements très laids incarnant soi-disant la « tendance ». Nicolas Domenach en est réduit à jouer à « rumeurs/pas rumeurs » sur les coulisses de la politique, et Ariel Wizman à faire des sketches plus ou moins drôles. Quant à Anne-Elisabeth Lemoine, elle en est réduite à parler des programmes de télé…
En somme, on est passé d’une émission d’information avec un zeste de divertissement à un divertissement qui prétend faire de l’information, alors qu’il ne propose que du people, des scandales, et des vidéos youtube. Merci Bruce Toussaint, grâce à votre émission, je me sens intelligent, voir aérien… Je remercie également Canal + pour la mise en place du service « à la demande » qui me permet de regarder les sessions du Grand Journal que j’ai manquées à la place.
Il devient difficile, voir impossible de trouver une information indépendante de qualité. Edwy Plenel, ex-directeur de la rédaction du journal Le Monde, a bien essayé en créant Media-Part, mais ses prises de position engagées et affichées discréditent le côté « indépendant » de la théorie. Et le contenu du site également, pour les rares fois où je l’ai consulté. Bref, pour conclure sur une note optimiste, merci à Internet qui nous permet de choisir nos sources d’informations, grâce à des agrégateurs comme Google ou Yahoo Actualités, car ces plateformes nous offrent l’accès gratuit et illimité aux médias étrangers et à des blogs souvent bien plus consistants que la plupart des sites français.



J’avais déjà rencontré Christopher Renshaw lors de la conférence de presse de juin, et j’ai finalement pu le rencontrer avec quelques autres, à savoir Stephen Clark, l’auteur du livret et des paroles originaux et Eric Taraud, qui a adapté le spectacle en Français. La rencontre la plus intéressante est sans conteste celle de Stephen Clark, qui a notamment travaillé avec Alain Boublil et Claude-Michel Schönberg, créateurs des Misérables, sur la comédie musicale Martin Guerre, produite à Londres avec un certain Jérôme Pradon dans le rôle titre.
Je n’ai pas bien compris pourquoi les autres médias ne se sont que très peu intéressés à l’auteur du spectacle, qui a du coup répondu avec beaucoup d’enthousiasme à nos questions. C’est vraiment passionnant de pouvoir rencontrer ce personnage un peu effacé, dans l’ombre du fantasque metteur en scène, mais qui a un vécu et un talent indéniable. C’est une bénédiction d’avoir la chance d’accueillir ces « monstres » du musical en France, et j’espère que la qualité du travail soulignée par l’ensemble de la troupe se retrouvera ultérieurement dans les productions françaises.
J’avais déjà rencontré Laurent Bàn, Liza Pastor et Benoit de Gaulejac, et j’ai donc ajouté à mon palmarès Géraldine Larrosa, Georges Beller et Yan Duffas. Ce dernier, très sympathique, très humble, est surtout connu pour sa participation à plusieurs séries télévisées françaises (Equipe médicale d’urgence, pour la plus récente) et quelques longs métrages (7 ans de mariage, …). On le sent ravi d’être là, même s’il aurait adoré chanter plus. Il est très admiratif des artistes issus du milieu de la comédie musicale parisienne.
Mais ce n’est rien à côté de Georges Beller, dithyrambique à leur sujet (« Ce sont des stars », affirme-t-il). Manifestement très familier des médias, ce qui n’est pas étonnant au vu de ses expériences à la télévision (« Qui ne connait pas Georges Beller ? », a plaisanté Yan), c’était davantage un monologue qu’une interview, mais intéressant tout de même. Le spectacle semble vraiment lui plaire, et il est sensible à la dimension théâtrale poussée.
Géraldine Larrosa est très gentille, et a mis en perspective son expérience et le travail qu’elle a du fournir pour arriver sur Zorro. Raphaël Amargo a fait « sortir » son flamenco, elle a teint ses cheveux. Clin d’œil intéressant, quand je lui ai posé la question sur le destin de son personnage, elle a refusé de répondre, se fendant d’un « chut » complice et d’un joli sourire. Les artistes ont du recevoir des consignes strictes pour ne pas dévoiler l’histoire.
Enfin Laurent Bàn a confirmé la difficulté physique du rôle, et a remis en perspective ce rôle qu’il trouve bien plus complet et complexe que l’audition ne laissait présager, ce qui fait qu’il se sent extrêmement bien dans la troupe et dans le rôle. Et ça se voit, on dirait que c’est écrit pour lui ! Il nous a par ailleurs indiqué que l’album studio, qui sortira le 26 octobre prochain, propose des interprétations très différentes de ce qui sera demandé sur scène. Si j’ai correctement lu entre les lignes, j’ai eu la sensation que Laurent n’était pas très enthousiaste quand à l’album studio. Comme précisé plus haut, le premier clip n’est en effet pas spécialement rassurant.






